Hans Selye et le stress

vendredi 11 février 2011
par Philippe GOULOIS
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Hans Selye

- Né à Vienne le 26 janvier 1907, Hans Selye est mort à Montréal en 1982. Il a consacré sa vie à l’étude du stress. Il a été professeur et chercheur à l’Université de Montréal, où il a fondé l’Institut de médecine et de chirurgie expérimentale en 1945, qu’il a dirigé jusqu’en 1977. Il est aussi le fondateur de l’Institut international du stress (IIS).

- Une chaire de recherche de l’Université de Montréal porte son nom depuis 1989.

Le père du concept du stress

Hans Selye fut un des premiers chercheurs à s’être intéressé au stress vers le début du XXe siècle. Il a défini le stress comme l’ensemble des moyens physiologiques et psychologiques mis en œuvre par une personne pour s’adapter à un événement donné. Le changement brutal survenant dans les habitudes d’une personne, jusque-là bien équilibrée, est susceptible de déclencher un bouleversement dans sa structure psychique et même somatique.

Son œuvre a dévoilé les principaux dispositifs des organismes animaux face aux agressions de toute nature. Selye était aussi un endocrinologue qui a montré comment les hormones corticosurrénales sont mises en circulation lors d’agressions violentes de l’organisme. Dans son ouvrage Stress, il décrit un syndrome réactionnel endocrinien comportant trois phases consécutives : la « phase d’alarme », la « phase de réaction », la « phase d’épuisement ». C’est ce qu’il appelle le syndrome général d’adaptation ou le stress.

Le stress est une réaction de l’organisme : confronté à un danger, il aide celui-ci à faire front. Le stress est une réponse non spécifique du corps à toute demande qui lui est faite. Il existe une réponse spécifique de l’organisme, qui réagit au froid en produisant de la chaleur, à l’effort physique en sécrétant une hormone qui stimulera l’organisme, etc. Mais quelle que soit la nature du stimulus, l’organisme répond aussi d’une façon non spécifique, avec des changements biochimiques identiques, destinés à faire face à toute demande accrue imposée au corps humain. L’organisme répond aux stimuli afin de maintenir ce que les biologistes appellent un état d’équilibre ou homéostasie, c’est-à-dire la constance ou la stabilité des paramètres de l’organisme tels que la température corporelle, le taux de glucoses, etc.

Si l’ampleur de l’événement stressant ne dépasse pas les capacités de réponse normale, l’organisme n’en subira pas les conséquences. À l’inverse, si les ressources de cet organisme sont insuffisantes, s’il ne peut faire front à la quantité de stress qu’il doit gérer, des problèmes de tous ordres sont susceptibles de survenir. L’organisme entre alors dans un cercle vicieux, le système d’adaptation s’épuise et les conséquences du stress deviennent de plus en plus délétères.

Certains critères permettent de déterminer si une personne a atteint ou non le stade des dommages. En premier lieu apparaît l’irritabilité, puis viennent l’insomnie, les maux de tête, la difficulté à se concentrer, les troubles de la mémoire, etc.

Finalement, Hans Selye a montré que le phénomène de stress est un dispositif de vigilance salvatrice et que la sur-vigilance est dommageable lorsque la quantité de demandes dépasse la capacité de réponses du sujet. Hans Selye parle de stress négatif (défavorable) et de stress positif (favorable). Il est possible de transformer un stress négatif en stress positif.

Modèle de Selye

Le modèle de Selye, ou « théorie du syndrome général d’adaptation », est un ensemble de symptômes non spécifiques qui apparaissent quelle que soit la nature de l’agression.

Ce modèle distingue trois phases que l’on compare à un niveau de résistance normal :

- Réaction d’alarme : temps de préparation, mobilisation des ressources pour faire face au stress (phase en dessous du niveau de résistance normal, puis passage au-dessus)
- Phase de résistance : utilisation des ressources (phase au-dessus du niveau de résistance normal)
- Phase d’épuisement : apparition de différents troubles somatiques (phase de déclin du niveau de résistance de la phase précédente au niveau normal)

- Réaction d’alarme

La première phase correspond à l’ensemble des phénomènes généraux non spécifiques provoqués par l’exposition soudaine de l’organisme à un stresseur, auquel cet organisme n’est pas adapté, ni qualitativement, ni quantitativement. Par exemple, lorsqu’un travailleur est soumis à une charge de travail trop importante dans un délai bref.

L’auteur divise cette phase en choc et contre-choc.
— Le choc représente l’état de surprise à l’agression soudaine. Il est formé de symptômes d’altérations passives traduisant un état de souffrance générale de l’organisme, telles que la tachycardie, l’augmentation du tonus musculaire, la dilatation des pupilles, l’hypothermie ou encore l’hypotension. Cette phase dure de quelques minutes à 24 heures. La phase de choc est suivie de la phase de contre-choc.
— Durant la phase de contre-choc, l’organisme développe des moyens de défense active, caractérisés par l’inversion des signes de la phase de choc : telles que l’augmentation de la diurèse, l’augmentation du volume plasmatique ou encore l’élévation de la température. Hans Selye remarqua une modification de l’adénohypophyse et du cortex surrénal témoignant de l’hyperactivité de ces glandes. Si les stimuli qui ont provoqué la réaction d’alarme se prolongent, l’organisme entre dans la phase de résistance.

- La phase de résistance, d’habituation ou d’endurance

Selye définit la phase de résistance comme l’ensemble des réactions non spécifiques provoquées par l’exposition prolongée de l’organisme à des stimuli nocifs, auxquels il s’est adapté au cours de la réaction d’alarme. Lorsque la situation stressante se prolonge, les manifestations physiologiques s’atténuent en s’habituant à l’environnement stressant. La phase de résistance prolonge et accentue les phénomènes amorcés au cours de la phase de contre-choc. Si les stimuli se prolongent davantage, l’organisme peut atteindre la phase d’épuisement.

- La phase d’épuisement

Selye définit cette phase comme l’ensemble des réactions non spécifiques qui caractérisent le moment où l’organisme cesse de pouvoir s’adapter au stimulus auquel il est soumis. Cette dernière phase constitue l’épuisement de l’organisme au fil du temps. Les manifestations passives de la phase de choc (de la phase d’alerte) reviennent et l’emportent sur les manifestations de défense active. La capacité de résistance devient plus faible et peut conduire à la mort. La mort résulte de la destruction des glandes surrénales. Ce phénomène a été constaté sur des animaux.

Citations

« [...] L’idée du concept de stress et du syndrome général d’adaptation (S.G.A.) m’est venue en 1925, alors que j’étudiais la médecine à l’Université de Prague. [...] Je ne pouvais comprendre pourquoi, dès l’aube de l’histoire de la médecine, des médecins ont concentré tous leurs efforts sur la reconnaissance de la maladies particulières et la découverte de remèdes spécifiques sans prêter aucune attention à quelque chose de beaucoup plus évident : " le syndrome du simple fait d’être malade ". Je savais qu’un syndrome est " un groupe de signes et de symptômes qui se présentent ensemble et caractérisent une maladie ". Eh bien ! les patients que je venais de voir avaient un syndrome, mais il semblait que ce fût un syndrome caractérisant la maladie en tant que telle et non une maladie particulière. Serait-il possible d’analyser ce " syndrome général de la maladie " et peut-être même trouver des remèdes capables d’agir contre le facteur non spécifique dans la maladie ? Ce ne fut, cependant, que dix années plus tard que je parvins à exprimer tout cela dans le langage précis de la description scientifique fondée sur l’expérimentation. [...] Dans son ensemble, le syndrome de stress, ou syndrome général d’adaptation (S.G.A.) évolue selon trois stades successifs : 1) La " réaction d’alarme " pendant laquelle les forces de défense sont mobilisées ; 2) Le " stade de résistance " qui reflète la complète adaptation à l’agent " stressant " ; 3) Le " stade d’épuisement " qui suit inexorablement pourvu que l’agent stressant soit assez puissant et agisse assez longtemps, le pouvoir d’adaptation d’un être vivant étant toujours limité. » 1 « Pour qu’un rêve devienne réalité, il faut avant tout une grande capacité à rêver. Puis en son rêve une confiance. Et de la persévérance. »

Archives sur Radio-Canada Date de diffusion : 1er février 1976

Dans le cadre de l’émission Entretiens diffusée le 1er février 1976, Fernand Ouellet rencontre l’endocrinologue et chercheur canadien d’origine austro-hongroise Hans Selye, mondialement reconnu comme le père du stress.

Hans Selye explique pourquoi, en 1936, il a choisi le mot « stress » pour désigner ce qu’il avait d’abord identifié comme le syndrome général d’adaptation. Il explique l’assertion selon laquelle le stress, c’est la « réaction non spécifique de l’organisme à n’importe quelle demande ». Il définit différents symptômes du stress qu’il a observés lors de ses expérimentations sur des animaux. Il rappelle qu’il s’agit d’une manifestation normale qu’il faut distinguer de la détresse et qu’il existe deux types de stress. Ecouter